Commentaire de l’Écriture, La Croix, 2ème dimanche de carême, année A

Gn 12, 1-4a
Ps 32 (33), 4-5, 18-19, 20.22
2 Tm 1, 8b-10
Mt 17, 1-9

Partageons la parole de Dieu avec Patrick Laudet, diacre à la cathédrale Saint-Jean de Lyon.

Comprendre

Dieu n’aime pas le grand spectacle ni les effets spéciaux. Il n’a de cesse pourtant de se manifester aux hommes qui, bien sûr, pensent à tout, sauf à lui. Alors, il consent parfois à des « théophanies », ces moments un peu spectaculaires où il manifeste clairement sa divinité. Il montre alors qu’il est Dieu, tout simplement, mais toujours à mesure d’homme. Il n’aime ainsi ni l’orage, ni les éclairs, mais, pour nous convaincre qu’il est là et qu’il existe, il préfère les petits buissons ardents, ou la brise légère. Et la transfiguration ? Au mont Thabor, pour donner du courage à trois de ses disciples qui seront un jour avec lui à Gethsémani, il fait un cadeau : soudain, l’éclat de sa divinité transparaît à travers son humanité. Rien d’un grand show hollywoodien ! Juste un instant de lumière, pour leurs yeux ; comme une petite empreinte rétinienne de la Résurrection, de laquelle ils n’ont encore guère idée. Pour garder l’espérance, d’une montagne à l’autre, quand celle de la nuit remplacera celle de la lumière.

Méditer

La Transfiguration, une bien curieuse ascension. Voilà que le Dieu fait homme, descendu si bas pour partager nos jours, lui qui connaît si bien les faux sommets et les pics d’illusion, où le démon a tenté de le hisser, n’a maintenant qu’élévation au cœur et cime en tête. Elle n’est pourtant pas bien arrogante en vérité, cette petite montagne émouvante du Thabor sur laquelle il a entraîné ce jour-là trois de ses apôtres, Pierre, Jacques et Jean.

Sur le chemin qui y monte, ils ont mis leurs petits pas d’hommes dans le grand pas de Dieu. Mais alourdis par leur pesante humanité, ils se sont endormis, là déjà, comme un jour prochain à Gethsémani. Ils viennent tout juste de se réveiller, ouvrent grand les yeux, sans pouvoir se lever, terrassés par une effraction de gloire pourtant si douce. Ils ont encore un peu de mal à se hisser à ces sommets de la communion avec Dieu. Ils comprennent soudain que, pendant qu’ils dormaient, à cette altitude mystérieuse où tous les hommes deviennent contemporains, c’est avec Élie et Moïse que Jésus conversait. Moïse, du front duquel dardent encore, mais discrètement, les rayons de cette gloire reçue au Sinaï. Élie, dont la barbe à elle seule raconte la profonde sagesse, suspendu dans cette éternité où flottent les prophètes. Téléportés soudain dans la vie du Ciel, les apôtres, qui savent les Écritures, sont à même de saisir d’un seul regard tout l’enchaînement de la promesse. Avec Moïse, à leur tour, ils voient en Jésus le feu pris au buisson. Avec Élie, à leur tour, ils entendent cette brise légère, ce « bruit de fin silence », dans une oreille ouverte comme jamais : « Celui-ci est mon Fils bien aimé, en qui je trouve ma joie, dit alors la voix dans la nuée, écoutez-le ! ». Une épiphanie divine qui n’a en vérité rien de tapageur. L’ostentation de la gloire, sans doute plus caressante qu’éblouissante, plus miséricordieuse que radieuse, a dû laisser aux yeux des hommes le temps de s’accommoder à la splendeur de Dieu. Et surtout d’en faire provision. Car la route qui leur reste sera longue, et difficile. Le souvenir du Thabor sera désormais leur phare. Quels sont les Thabor lumineux de nos vies, et en gardons-nous assez mémoire ?

Prier

Seigneur, comme tu l’as fait pour Pierre, Jacques et Jean, élève nos existences, transfigure parfois l’ordinaire de nos jours et mets-nous en présence intense de la Vie, de la lumière et de l’amour incroyable de Dieu.

Seigneur, comme tu l’as fait pour Pierre, Jacques et Jean, imprime à jamais dans nos cœurs la mémoire des vrais moments de grâce de nos vies, pour que la route parfois âpre de l’existence en soit à jamais éclairée.

Seigneur, comme tu l’as fait pour les autres disciples, donne-nous de croire au témoignage de nos frères et, dans ce qu’ils nous partagent parfois de leurs histoires incroyables, de contempler ta gloire divine et ta miséricorde infinie.