La Mission

 

Je suis partie douze mois en mission avec Points-Cœur dans un quartier défavorisé de Dakar. Je vivais avec d’autres jeunes et notre mission était d’offrir une présence pour les gens du quartier qui rencontraient de grandes difficultés.

Concrètement, nous partions chaque jour visiter nos amis (mamans débordées, personnes âgées souffrant de la solitude, de la maladie, travailleurs fatigués…). Ces visites avaient juste pour but de proposer des temps simples d’amitié, comme une respiration, pour ceux qui avaient besoin de souffler un peu.

Nous avions aussi une mission particulière auprès des enfants qui passent leur journée dans la rue et recherchent souvent l’attention d’un adulte. Nous les accueillions tous les jours dans la maison pour jouer, cuisiner, partager un repas… Chaque minute que nous pouvions leur accorder semblait un cadeau inestimable.

Je ne vous surprendrai pas en vous disant qu’au cours de cette année j’ai beaucoup reçu en découvrant leurs trésors. D’abord, une joie et une espérance qui contrastaient avec les épreuves qu’ils rencontraient. Plus d’une fois ce sont leurs sourires et leurs salutations qui ont redonné du sens à mes journées. De plus, la sagesse des adultes qui acceptent avec foi et espérance les épreuves m’a aussi beaucoup marqué. Une voisine mourante nous dit calmement un jour, après avoir parlé de ses souffrances, « Dieu est bon », une évidence pour elle – et pour tout ce peuple –  qui semblait remettre simplement chaque chose à sa place.

Anouck Martin

 

 

J’aimerais vous partager l’histoire d’un homme qui a profondément marqué ma mission en Inde, Ramesh Appa.

Cet homme a connu un tout autre destin que celui auquel il était destiné. N’ayant pas été encouragé à aller à l’école, Ramesh a vite été entraîné dans les jeux d’argent, la cigarette… Il volait de l’argent afin de pouvoir jouer. Lorsque son père a découvert la situation, il lui a brûlé les pieds. Ramesh avait treize ans.

Le cadre familial n’a pas permis à ce petit garçon de s’épanouir. À vingt ans, Ramesh a quitté sa famille et s’est retrouvé seul, prisonnier de la violence et de l’alcool. Ramesh

 

ne s’est pas adouci dans son mariage. Sa femme a fini par fuir ses violences avec ses deux filles et Ramesh s’est retrouvé à la rue.

C’est dans cet état qu’il a été recueilli au Jardin (lieu d’accueil Points-Cœur). Au début, il s’emportait vite et restait accroché à ses addictions. Puis, peu à peu, il s’est vu offrir une nouvelle famille au Jardin. Il s’est laissé aimer, il s’est adouci. À quarante ans, il a doucement abandonné la cigarette pour apprendre à lire, à cuisiner et à soigner sa brûlure.

Ramesh est maintenant un homme transformé. Cette nouvelle famille lui a donné des racines pour retrouver sa liberté face à la violence dans laquelle il était prisonnier. Doux et attentif à chacun,      Ramesh a découvert la joie d’aimer et d’être aimé.

La brûlure de ses pieds n’est toujours pas cicatrisée et ne le sera peut-être jamais, mais je crois qu’il a trouvé la famille qu’il cherchait.

Eugénie Lebleu