Les Vacances, la valse des temps

 

 

Juin, un enfer ? Si la raison ne veillait pas sur mes pensées, je ne serais pas loin de le croire. Épuisé, vidé, les journées ont été si longues, si chargées. En cette fin d’année scolaire, tout s’est accéléré et j’ai perdu le contrôle du temps, de mon temps.

Ce mois effervescent pourtant si beau, je finis par le maudire. Quelle injustice !

Mais voilà qu’il se termine et je me sens enfin plus léger, libéré d’un poids.

Car le temps est venu, le temps d’après, celui des vacances. Ah, les vacances, elles embrassent, dans une valse étourdissante, tous les temps : le temps qu’il fait, le temps qui passe, le temps libre et le temps programmé, le temps pour soi et le temps pour les autres, le temps de l’intériorité et celui de l’extériorité. Au commencement, le temps des vacances me paraît toujours immense. J’ai tout le temps devant moi, je vais pouvoir prendre du temps…

Très vite, je dresse la liste quotidienne de tout ce que je vais pouvoir faire. D’abord me réveiller sans alarme, déjeuner dehors avec le chant des oiseaux, chausser des baskets et me remettre au sport, marcher et aller faire le marché, siroter un verre de citronnade avant de prendre le menu d’été puis, bien-sûr, faire une sieste pas trop longue pour ne pas dérégler mon sommeil, déguster quelques abricots ou une pêche bien mûre et surtout, bien installé dans un transat à l’ombre d’un arbre, tourner enfin les pages du roman qui m’attend depuis plusieurs mois sur ma table de nuit.

Le temps des vacances, c’est le paradis sur terre. Pourtant, au septième jour, je dresse une nouvelle liste de tout ce que je devais faire pendant cette période bénie. Jouer avec mes enfants au dernier jeu de société offert à Noël, visiter le beau village qui nous a été conseillé par le guide « à voir et à faire près de chez vous cet été », ne pas oublier d’organiser notre pique-nique traditionnel avec les cousins, faire réviser l’automobile avant de partir car il faut bien partir, vacances obligent, repeindre les volets de la maison, honorer un rendez-vous chez le dentiste pour toute la famille et surtout mettre de l’ordre, trier, ranger l’accumulation de toute une année.

Soudain, le temps des vacances s’obscurcit, se raccourcit, le ciel s’assombrit et le temps devient lourd. Je laisse passer l’orage, le ciel de nouveau s’éclaircit et je reprends la liste de mes envies. Et puis non, je me décide à déchirer ces fichues listes, mettre à la poubelle les post-it de couleur accrochés sur le réfrigérateur. C’est juré, je vais lâcher prise, apprendre à danser. Danser la valse des vacances, me laisser porter par cette valse des temps pour mieux goûter aux bonheurs les plus simples de la vie. Très belles vacances…!

Gilles Bouzon